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jeudi 2 juin 2022

Le Roman de la Rose de Guillaume de Lorris

 Le locus amoenus  (lieu agréable)

La fin’amor dans le verger de Déduit :

Dame Oiseuse  invitant l’Amant

 à entrer dans le verger de Déduit. 



Le jardin de Déduit, enluminure, manuscrit sur parchemin in Roman de la Rose, copié et enluminé par Master of the Prayer books (maître enlumineur anonyme en Flandre) pour Engelbert II de Nassau, Bruges, fin XVe siècle,

255 × 190 mm, collect. Harley MS 4425, f. 12 v, British Library, Londres,

Un des manuscrits de Le Roman de la Rose  de Guillaume de Lorris, XIIIe siècle.


La première partie du Roman de la Rose fut écrite en 4058 vers octosyllabiques, par Guillaume de Lorris vers 1230-1235, et le poème resta inachevé à sa mort. Le roman commence ainsi : « Voici le Roman de la Rose, / Où l’art d’Amour est toute enclose. »

C’est le songe du poète. Un matin de mai, il va se promener dans la campagne ; il se trouve soudain devant le haut mur d'un verger. La porte en est ouverte au jeune homme par Oiseuse (Oisiveté) qui le conduit à un verger. Là, les oiseaux chantent, il y a une douce  musique : Déduit (le Plaisir), Liesse, Beauté, Richesse, Courtoisie, et d'autres personnages allégoriques se divertissent, tous richement vêtus. 


"Ce Roman qui va commencer : 

Ci est le roman de Rose 

Où l'art d'Amour est toute enclose. 

La matière de ce Roman 

Est bonne et neuve assurément;

 Mon Dieu! que d'un bon œil le voie 

Et que le reçoive avec joie

 Celle pour qui je l'entrepris; 

C'est celle qui tant a de prix 

Et tant est digne d'être aimée, 

Qu'elle doit Rose être nommée.

 Il est bien de cela cinq ans;

 C'était en mai, amoureux temps 

Où tout sur la terre s'égaie;

 Car on ne voit buisson ni haie

 Qui ne se veuille en mai fleurir 

Et de jeune feuille couvrir. 

Les bois secs tant que l'hiver dure 

En mai recouvrent leur verdure."


Voici le Dieu d'Amour, entouré de sa cour : Doux Regard, Simplicité, Franchise, Beau Semblant. Le poète se laisse charmer par cette ambiance et soudain, il tombe en extase devant une rose d'une merveilleuse beauté. Amour lui décoche alors ses flèches. Le poète, devenu l'Amant, n'a plus  qu’un désir, celui de cueillir la rose. 




Mais les obstacles s’annoncent nombreux : Jalousie, Papelardise (hypocrisie), Danger, Male-Bouche (médisance). L’Amant ne termine pas sa quête. Cette première partie est une sorte de synthèse poétique de la fin'amor, un art d’aimer subtil, inspiré d’Ovide, mais magnifié par la lyrique courtoise.

Cette grande enluminure du XVe siècle occupe tout un folio du manuscrit belge qui comporte 4 grandes miniatures et 88 petites. Elle représente l’entrée du poète dans le jardin de Déduit qui, au Moyen Age, s’appelait le lieu agréable (locus amoenus),  jardin clos de type monastique (hortus conclusus) dédié à la Vierge, selon les mots du Cantique des Cantiques, 4,12 :

« Tu es un jardin fermé, ma sœur, ma fiancée, / Une source fermée, une fontaine scellée. ».