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samedi 27 mars 2021

L’Ingénu, de Voltaire (1767) chapitre 1, commentaire partie 1 Un Huron questionné

 L’Ingénu, de Voltaire (1767)

 

L’histoire (résumé de Wikipédia)

Alors que l’abbé de Kerkabon et sa sœur se lamentent de la mort de leur frère et de sa femme partis au Canada, arrive par un bateau anglais,  un jeune homme Huron, l’Ingénu (surnommé ainsi du fait de sa naïveté vis-à-vis du monde occidental). Les Kerkabon l’invitent à dîner, et s’aperçoivent qu’il s’agit de leur neveu. Ils le convertissent alors au catholicisme et le baptisent, mais il tombe amoureux de la sœur d’un abbé, Mlle de Saint-Yves, qu’il ne peut épouser parce qu’elle est sa marraine, à moins d’aller demander l’autorisation au pape. Rendu furieux, il tente ingénument de violer la belle, qu’on se hâte de mettre dans un couvent. Repoussant par hasard une invasion d’Anglais, il décide de partir pour Versailles afin de demander au roi une récompense pour sa bravoure, et une dispense lui permettant d’épouser celle qu’il aime. En chemin, il rencontre des Huguenots chassés du fait de l’édit de Fontainebleau et décide de prendre leur défense auprès du roi. Cependant, il n’arrive pas à faire entendre sa voix à Versailles, et se fait embastiller à la suite de deux lettres le dénonçant, dont une affirmant son engagement en faveur des Huguenots. En prison, il fait la connaissance du janséniste Gordon, qui tente de le former aux préceptes de cette doctrine ; mais bien vite, l’Ingénu l’amène à remettre en question ses convictions. Pendant ce temps, Mlle de Saint-Yves part à Versailles pour faire libérer son amant ; mais afin d’obtenir l’aide de Mgr de Saint-Pouange, qui peut le faire délivrer, celui-ci lui demande de se compromettre avec lui. Refusant tout d’abord, elle se résout, suite aux conseils fallacieux du père jésuite Tout-à-tous, à commettre cet adultère. Elle repart chez les Kerkabon avec l’Ingénu et Gordon mais, ne pouvant se résoudre à dire la vérité à son amant et refusant de le trahir, se laisse mourir. L’Ingénu, effondré tout d’abord, se ressaisit, obtient sa récompense, et reste ami avec Gordon.


L’Ingénu, de Voltaire (1767) chapitre 1


1ère partie : un Huron questionné

 

Huron de Lorette au Canada

 

"Le bruit se répandit bientôt qu’il y avait un Huron au prieuré. La bonne compagnie du canton s’empressa d’y venir souper. L’abbé de Saint-Yves y vint avec mademoiselle sa sœur, jeune basse-brette, fort jolie et très bien élevée. Le bailli, le receveur des tailles, et leurs femmes furent du souper. On plaça l’étranger entre mademoiselle de Kerkabon et mademoiselle de Saint-Yves. Tout le monde le regardait avec admiration; tout le monde lui parlait et l’interrogeait à-la-fois ; le Huron ne s’en émouvait pas. Il semblait qu’il eût pris pour sa devise celle de milord Bolingbroke, Nihil admirari. Mais à la fin, excédé de tant de bruit, il leur dit avec assez de douceur, mais avec un peu de fermeté : Messieurs, dans mon pays on parle l’un après l’autre ; comment voulez-vous que je vous réponde quand vous m’empêchez de vous entendre ? La raison fait toujours rentrer les hommes en eux-mêmes pour quelques moments: il se fit un grand silence. Monsieur le bailli, qui s’emparait toujours des étrangers dans quelque maison qu’il se trouvât, et qui était le plus grand questionneur de la province, lui dit en ouvrant la bouche d’un demi-pied : Monsieur, comment vous nommez-vous ? On m’a toujours appelé l’Ingénu, reprit le Huron, et on m’a confirmé ce nom en Angleterre, parce que je dis toujours naïvement ce que je pense, comme je fais tout ce que je veux.

Comment, étant né Huron, avez-vous pu, monsieur, venir en Angleterre ? C’est qu’on m’y a mené ; j’ai été fait, dans un combat, prisonnier par les Anglais, après m’être assez bien défendu ; et les Anglais, qui aiment la bravoure, parce qu’ils sont braves et qu’ils sont aussi honnêtes que nous, m’ayant proposé de me rendre à mes parents ou de venir en Angleterre, j’acceptai le dernier parti, parce que de mon naturel j’aime passionnément à voir du pays.

Mais, monsieur, dit le bailli avec son ton imposant, comment avez-vous pu abandonner ainsi père et mère ?
C’est que je n’ai jamais connu ni père ni mère, dit l’étranger. La compagnie s’attendrit, et tout le monde répétait, Ni père, ni mère ! Nous lui en servirons, dit la maîtresse de la maison à son frère le prieur : que ce monsieur le Huron est intéressant ! L’Ingénu la remercia avec une cordialité noble et fière, et lui fit comprendre qu’il n’avait besoin de rien. Je m’aperçois, monsieur l’Ingénu, dit le grave bailli, que vous parlez mieux français qu’il n’appartient à un Huron. Un Français, dit-il, que nous avions pris dans ma grande jeunesse en Huronie, et pour qui je conçus beaucoup d’amitié, m’enseigna sa langue ; j’apprends très vite ce que je veux apprendre. J’ai trouvé en arrivant à Plymouth un de vos Français réfugiés que vous appelez huguenots, je ne sais pourquoi; il m’a fait faire quelques progrès dans la connaissance de votre langue; et dès que j’ai pu m’exprimer intelligiblement, je suis venu voir votre pays, parce que j’aime assez les Français quand ils ne font pas trop de questions.

L’abbé de Saint-Yves, malgré ce petit avertissement, lui demanda laquelle des trois langues lui plaisait davantage, la huronne, l’anglaise, ou la française. La huronne, sans contredit, répondit l’Ingénu. Est-il possible ? s’écria mademoiselle de Kerkabon ; j’avais toujours cru que le français était la plus belle de toutes les langues après le bas-breton.

Alors ce fut à qui demanderait à l’Ingénu comment on disait en huron du tabac, et il répondait taya : comment on disait manger, et il répondait essenten. Mademoiselle de Kerkabon voulut absolument savoir comment on disait faire l’amour; il lui répondit trovander, et soutint, non sans apparence de raison, que ces mots-là valaient bien les mots français et anglais qui leur correspondaient. Trovander parut très joli à tous les convives.
Monsieur le prieur, qui avait dans sa bibliothèque la grammaire huronne dont le révérend P. Sagar Théodat, récollet, fameux missionnaire, lui avait fait présent, sortit de table un moment pour l’aller consulter. Il revint tout haletant de tendresse et de joie; il reconnut l’Ingénu pour un vrai Huron. On disputa un peu sur la multiplicité des langues, et on convint que, sans l’aventure de la tour de Babel, toute la terre aurait parlé français.
L’interrogant bailli, qui jusque-là s’était défié un peu du personnage, conçut pour lui un profond respect ; il lui parla avec plus de civilité qu’auparavant, de quoi l’Ingénu ne s’aperçut pas."

 

I) Une société rétrograde et conservatrice

           

        a) Les types de personnages

  • Présence de personnages types de l’ancien régime (receveur des tailles, bailli....) dans un lieu caractéristique qu’est le prieuré, censé être un modèle des valeurs morales, de l’éducation … Ce dîner est ainsi contraire à ce à quoi on pourrait s’attendre.
  • Le bailli est le représentant de la justice. Il semble strict et “imposant”. Il est ici apparenté à un officier de police, menant un véritable interrogatoire de l’ingénu. On peut d’ailleurs observer un schéma de questions/réponses entre les deux hommes. Les commentaires du narrateur sur le bailli sont négatifs (satire sociale) : “le plus grand questionneur”, “ouvrant la bouche d’un demi-pied”. Il semble jouer une pantomime.

  • Les deux représentants du clergé, l’abbé de St Yves et l’abbé de Kerkabon, se désintéressent de la religion pour se concentrer sur la question de la langue (huronne et française). Ils doutent sur la langue huronne et n’ont pas confiance dans les dires du Huron : ils vont d’ailleurs vérifier dans un dictionnaire.

  • Les femmes, vieilles comme jeunes, sont uniquement axées sur l’amour et les sentiments. Mlle de St Yves et Mlle de Kerkabon (qui est d’ailleurs désignée péjorativement comme “la Kerkabon”) utilisent le prétexte de la langue, introduit par les questions, pour se renseigner sur la vie amoureuse du Huron.

           

       b) Les préjugés

  • Tous les convives en dehors du Huron cultivent un ethnocentrisme français exacerbé : “J’avais toujours cru que le français était la plus belle de toutes les langues après le bas-breton”. Pour eux, il n’existe rien en dehors de la France et de ses mœurs : “Toute la Terre aurait parlé français”. Cependant, cela reflète une certaine réalité de l’époque car la langue des intellectuels européens du XVIIIème siècle était effectivement le français.

  • Le Huron est considéré par les Bas-Bretons comme une bête de foire. Cette curiosité malsaine amène les nombreuses questions, parfois indiscrètes, des hôtes : “comment avez-vous pu abandonner ainsi père et mère ?”. De plus, le fait que l’ingénu parle couramment le français étonne les convives qui “le regardait avec admiration”. Cela s’explique par le fait qu’habituellement les Indiens (ramenés des expéditions) étaient exposés dans des cages et le contraste avec ce “sauvage” cultivé est saisissant.

  • Les préjugés des Bas-Bretons les amènent à être odieux et malpolis, pensant que l’ingénu  a des mœurs proches de l’animal : “Tout le monde lui parlait et l’interrogeait à la fois”. Bien qu’ils se croient supérieurs, ils se montrent moins civilisés que le Huron.

 

II)  Le “bon sauvage” à la manière de Voltaire

           

       a) Ses qualités

  • Le Huron reste imperturbable avec une référence à “milord Bolingbroke : nihil admirari “. Il reste également réfléchi car il parle peu mais analyse le discours des autres et s’exprime toujours en dernier. Il montre une certaine maturité et sagesse par rapport aux autres.

  • Il est poli, courtois et civilisé. Il répond “avec assez de douceur, mais avec un peu de fermeté” mais il ne coupe pas la parole, écoute ses hôtes et inspire “le respect”. Il est également très instruit puisqu’il parle couramment trois langues (huron, anglais et français), il a beaucoup voyagé et il aime apprendre (“savoir” des philosophes).
  • Le Huron a du répondant “j’aime assez les français quand ils ne font pas trop de questions” et ne se laisse pas influencer par les autres (“vouloir” des philosophes”) : “lui fit comprendre qu’il n’avait besoin de rien”, “comment voulez-vous que je vous réponde quand vous m’empêcher de vous entendre ?”. Il utilise des arguments et un raisonnement logique contrairement aux autres personnes qui se laissent dépasser par leurs préjugés.

 

         b) Valeurs huronnes

 

  • L’ingénu respecte l’autre : “remercia avec une cordialité noble et fière” et la liberté d’expression : “Messieurs, dans mon pays on parle l’un après l’autre”.

 

  •  Il fait ses propres choix “m’ayant proposé de me rendre à mes parents ou de venir en Angleterre”. Il a une liberté de conscience et d’opinion. On remarque d’ailleurs l’analogie avec l’Angleterre, pays plus libre que la France, refuge des intellectuels et qui laissait la liberté de culte : “un de vos français réfugiés que vous appelez huguenots” (référence à l’intolérance religieuse qui frappe les Protestants et les a obligés à s’expatrier).

 

  • Le Huron nous fait prendre conscience du relativisme des cultures. En effet, il existe également un dictionnaire huron. Le “bon sauvage” n’en reste pas moins plus ouvert au monde et respectueux des autres cultures que les Bas-Bretons.

 Voir la suite dans article suivant.


Mégane 1S1 (juin 2010)

L’Ingénu, de Voltaire, chap 1, partie 2 L'amour à la huronne

 L’Ingénu, de Voltaire, chap 1, partie 2

2ème partie : l’amour à la huronne

 

"Mademoiselle de Saint-Yves était fort curieuse de savoir comment on faisait l’amour au pays des Hurons. En faisant de belles actions, répondit-il, pour plaire aux personnes qui vous ressemblent. Tous les convives applaudirent avec étonnement. Mademoiselle de Saint-Yves rougit et fut fort aise. Mademoiselle de Kerkabon rougit aussi, mais elle n’était pas si aise ; elle fut un peu piquée que la galanterie ne s’adressât pas à elle ; mais elle était si bonne personne, que son affection pour le Huron n’en fut point du tout altérée. Elle lui demanda, avec beaucoup de bonté, combien il avait eu de maîtresses en Huronie. Je n’en ai jamais eu qu’une, dit l’Ingénu; c’était mademoiselle Abacaba, la bonne amie de ma chère nourrice ; les joncs ne sont pas plus droits, l’hermine n’est pas plus blanche, les moutons sont moins doux, les aigles moins fiers, et les cerfs ne sont pas si légers que l’était Abacaba. Elle poursuivait un jour un lièvre dans notre voisinage, environ à cinquante lieues de notre habitation ; un Algonquin mal élevé, qui habitait cent lieues plus loin, vint lui prendre son lièvre; je le sus, j’y courus, je terrassai l’Algonquin d’un coup de massue, je l’amenai, aux pieds de ma maîtresse, pieds et poings liés. Les parents d’Abacaba voulurent le manger, mais je n’eus jamais de goût pour ces sortes de festins ; je lui rendis sa liberté, j’en fis un ami. Abacaba fut si touchée de mon procédé qu’elle me préféra à tous ses amants. Elle m’aimerait encore si elle n’avait pas été mangée par un ours : j’ai puni l’ours, j’ai porté longtemps sa peau ; mais cela ne m’a pas consolé.

Mademoiselle de Saint-Yves, à ce récit, sentait un plaisir secret d’apprendre que l’Ingénu n’avait eu qu’une maîtresse, et qu’Abacaba n’était plus ; mais elle ne démêlait pas la cause de son plaisir. Tout le monde fixait les yeux sur l’Ingénu ; on le louait beaucoup d’avoir empêché ses camarades de manger un Algonquin."

 

 

I) Version nature

 

            a) Un récit ironique

 

-   L’histoire racontée par le Huron est un véritable exercice de style. Il compare sa maîtresse à la nature (joncs, aigles …). La répétition de “ ne sont pas” crée un parallélisme de construction. “Je le sus, j’y courus, je terrassais” et une gradation qui peut être considérée comme un pastiche de la célèbre parataxe de César (“Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu”) ou de Racine (“Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue”).

 

-   Le nom de la maîtresse de l’Ingénu, Abacaba, est proche de Abracadabra, ce qui prouve l’utilisation de l’humour. De plus, le fait qu’elle soit mangée par un ours est une parodie du drame grâce à cette fin qui fait sourire malgré sa cruauté.

 

-   Voltaire se moque du côté sauvage que l’ingénu laisse entrevoir : sa tribu a des rites cannibales, il porte la peau de l’ours comme un trophée de guerre et il ”terrassait l’Algonquin d’un coup de massue”.

 

- L’exagération des distances “environ cinquante lieues de notre habitation”, “cent lieues plus loin” renforce l’effet comique de ce récit.

 

            b) Valeurs d’un “huron sauvage”

 

-   Il prouve son amour par des actes guerriers (l’Algonquin puis l’ours pour défendre et venger sa maîtresse). Ainsi, c’est “en faisant de belles actions” qu’Abacaba le “préféra à tous ses amants”.

 

-   On assiste à une véritable parade du mâle : “Je l’amenai aux pieds de ma maîtresse, pieds et poings liés”. L’Algonquin devient ainsi un cadeau, une offrande à la femme qu’il aime.

 

-   Ses mœurs sont proches de celles des animaux. Il combat pour dominer ses adversaires, la notion de territoire est primordiale.

 

Le Verrou de Fragonard, 1778, musée du Louvre

 

II) Version culture

 

a)   Des femmes ridicules

 

-   Les pensées et les sentiments de Mlle de St Yves et de Mlle de Kerkabon encadrent le récit du Huron : “elle lui demanda avec beaucoup de bonté combien il avait eu de maitresses en Huronie” et “Mlle de St Yves, à ce récit, sentit un plaisir secret d’apprendre que l’Ingénu n’avait eu qu’une maîtresse”. Cela montre bien leur intérêt pour le personnage exotique du Huron, qu’elles convoitent.

 

-   L’apparente pruderie des deux femmes masque en réalité un vif intérêt pour l’amour et le libertinage. On parle de “plaisirs secrets” et de “maîtresses”, où la marque du pluriel montre l’ancrage du libertinage dans leurs mœurs.

 

-   On observe une caricature des vieilles filles avec leur dispute, leur combat secret pour obtenir les faveurs du Huron. Leur jalousie ressort : “elle fut un peu piquée que la galanterie ne s’adressât pas à elle”, “ Mlle de St Yves rougit et fut fort aise. Mlle de Kerkabon rougit aussi, mais elle n’était pas si aise”. Le parallélisme de construction est ainsi utilisé pour marquer l’ironie.

 

b)   Valeurs “civilisées”

 

-   Le Huron n’a eu qu’une seule maîtresse, preuve de sa fidélité, valeur quelque peu oubliée dans la société du XVIIIème siècle. Son amour est véritable puisqu’il fait une description très élogieuse d’Abacaba (registre épidictique)  et déclare en parlant de la mort de sa bien-aimée : “cela ne m’a pas consolé”.

 

-   La franchise des sentiments du Huron tranche avec la langue gazée (voilée, comme recouverte de gaze) du XVIIIème siècle. Il ne cache pas son amour, ne le fait pas sous-entendre.

 

-   L’Ingénu déclare ne pas aimer l’anthropophagie : “je n’eus jamais de goût pour ces sortes de festins”. Le Huron n’est pas cannibale, il apparaît comme civilisé et sociable aux yeux des Bas-Bretons.

 

- Il a des valeurs nobles, il respecte l’autre et sa liberté “je lui rendis sa liberté, j’en fis un ami”. Les notions de paix et sagesse semblent dominer chez ce prétendu sauvage. 

Voir la suite dans article suivant.

 

Mégane 1S1 (juin 2010)

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jeudi 25 mars 2021

L’Ingénu, de Voltaire, chapitre 1 commentaire, partie 3 Une leçon de tolérance

 

L’Ingénu, de Voltaire

 

3ème partie : une leçon de tolérance

 

"L’impitoyable bailli, qui ne pouvait réprimer sa fureur de questionner, poussa enfin la curiosité jusqu’à s’informer de quelle religion était M. le Huron ; s’il avait choisi la religion anglicane, ou la gallicane, ou la huguenote ? « Je suis de ma religion, dit-il, comme vous de la vôtre. - Hélas ! s’écria la Kerkabon, je vois bien que ces malheureux Anglais n’ont pas seulement songé à le baptiser. - Eh ! mon Dieu, disait mademoiselle de Saint-Yves, comment se peut-il que les Hurons ne soient pas catholiques ? Est-ce que les révérends pères jésuites ne les ont pas tous convertis ? » L’Ingénu l’assura que dans son pays on ne convertissait personne ; que jamais un vrai Huron n’avait changé d’opinion, et que même il n’y avait point dans sa langue de terme qui signifiât inconstance. Ces derniers mots plurent extrêmement à mademoiselle de Saint-Yves.
« Nous le baptiserons, nous le baptiserons, disait la Kerkabon à M. le prieur; vous en aurez l’honneur, mon cher frère ; je veux absolument être sa marraine : M. l’abbé de Saint-Yves le présentera sur les fonts: ce sera une cérémonie bien brillante ; il en sera parlé dans toute la Basse-Bretagne, et cela nous fera un honneur infini. » Toute la compagnie seconda la maîtresse de la maison ; tous les convives criaient : « Nous le baptiserons ! » L’Ingénu répondit qu’en Angleterre on laissait vivre les gens à leur fantaisie. Il témoigna que la proposition ne lui plaisait point du tout, et que la loi des Hurons valait pour le moins la loi des Bas-Bretons ; enfin il dit qu’il repartait le lendemain. On acheva de vider sa bouteille d’eau des Barbades, et chacun s’alla coucher.

Quand on eut reconduit l’Ingénu dans sa chambre, mademoiselle de Kerkabon et son amie mademoiselle de Saint-Yves ne purent se tenir de regarder par le trou d’une large serrure pour voir comment dormait un Huron. Elles virent qu’il avait étendu la couverture du lit sur le plancher, et qu’il reposait dans la plus belle attitude du monde."

 

 

I)  Une société rétrograde et conservatrice

 

a)   Les personnages

 

-   Le bailli “impitoyable” est un officier de police agressif avec la “fureur de questionner”. C’est lui qui questionne sur la religion et non les deux abbés. Il joue le rôle de l’Inquisition. Il y a donc collusion (union malhonnête) entre clergé et justice.

 

-   Les représentants du clergé, qui sont pourtant les principaux concernés par la question de la religion, ne prennent à aucun moment la parole. Ils ne semblent pas concernés, sont effacés, désintéressés et détournés de la religion et de leur vraie fonction.

 

-   Les femmes ressemblent à des pantins fanatiques qui s’agitent avec la répétition de “Nous le baptiserons”. Leurs esprits sont bornés et mécaniques, ce qui conduit à un étonnement stupide : “comment se fait-il que les Hurons ne soient pas catholiques ?”. La désignation péjorative de “la Kerkabon” renforce encore le sentiment de ridicule. De plus, le baptême du Huron n’est vu par ces deux femmes que pour son aspect festif : les intérêts sont personnels et non religieux : “ce sera une cérémonie bien brillante, il en sera parlé dans toute la Basse-Bretagne et cela nous fera un honneur infini”. Mlle de St Yves et Mlle de Kerkabon recherchent donc uniquement la gloire, une renommée, une popularité. On peut également remarquer le fait que Mlle de Kerkabon, à défaut d’avoir une relation amoureuse avec le Huron, veut “absolument être sa marraine”, pour avoir un lien, une certaine forme de relation avec l’Ingénu.

 

b)   Préjugés et critiques de la société

 

-   Malgré l’apparente pruderie des femmes, on assiste à un épisode de voyeurisme de leur part : “ne purent se tenir de regarder par le trou d’une large serrure pour voir comment dormait un Huron”. Cela montre leur vraie nature : elles sont irrespectueuses et pleines de désirs charnels.

 

-   L’ethnocentrisme religieux : “Est-ce que les RR.PP jésuites ne les ont pas tous convertis ?” est très présent. Les convives parlent de trois religions, “anglicane“, “gallicane” et “huguenote” mais ces religions sont toutes chrétiennes. Les convives nous prouvent leur fermeture d’esprit aux autres croyances. De plus, le fait que la religion protestante soit désignée comme huguenote est très péjoratif.

 

-   La rage de convertir des convives se retrouve avec la reprise, comme un cri de guerre de “nous le baptiserons”. Les adjectifs “impitoyable” et “fureur” montrent l’agression des Bas-Bretons envers le Huron. Leur déception face au fait que le Huron ne soit pas converti se traduit par l’interjection “Hélas !” et une critique envers l’Angleterre, plus tolérante par l’adjectif péjoratif “malheureux”. Mlle de Kerkabon s’étonne même que les Anglais “n’ait pas seulement songé à le baptiser”. L’adverbe « seulement » prouve que les hôtes se croient supérieurs à tous les autres peuples. La détermination de Mlle de Kerkabon à faire baptiser le Huron se fait sentir par l’emploi du verbe “vouloir” et de l’adverbe “absolument”.

 

Baptême de Clovis d’après Saint Gilles (en 496)

 

II)  La riposte huronne

 

a)   Tentative d’argumentation

 

-   Le Huron écoute et analyse le discours des autres convives pour mieux le réfuter, il parle le dernier et son discours est rapporté au discours indirect contrairement à celui des autres. Cela le distingue des autres, donne un aspect plus posé et travaillé avec la présence d’un raisonnement grâce à des connecteurs logiques : “et”, “enfin”.

 

-   Il utilise plusieurs arguments : religieux et moral : “dans son pays, on ne convertissait personne”, psychologique : “jamais un vrai Huron n’avait changé d’opinion”, linguistique et éthique : “il n’y avait point dans sa langue de terme qui signifiait inconstance”. Ce sont des arguments de valeurs. Mais il utilise également une analogie avec l’Angleterre, plus libre, dont il fait l’éloge : “En Angleterre, on laissait vivre les gens à leur fantaisie”. On repère bien l’admiration des philosophes des Lumières pour la tolérante Albion !

 

-   Son départ précipité dû à sa déception d’être dans un tel milieu : “il dit qu’il repartait le lendemain”, met fin à la discussion et lui donne un aspect conclusif. Il tente de faire réfléchir ses hôtes sur la question de la liberté religieuse et de la tolérance.

 

b)   Les valeurs défendues

 

- La notion de “vouloir” des philosophes, le raisonnement par soi-même et le rejet des préjugés.

 

-   La liberté de culte et d’opinion, marquées par un parallélisme : “Je suis de ma religion comme vous de la vôtre”.

 

- La tolérance religieuse et le relativisme des cultures.

 

Mégane 1S1 (juin 2010)

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samedi 20 mars 2021

La Critique de L’Ecole des femmes scène 5, Molière

 

Voir le texte ICI

 

Commentaire :

 

 La Critique de L’Ecole des femmes (1663), scène 5

 

 

L’Ecole des femmes, en 1662, est la première grande pièce de Molière qui sort du genre de la farce pour s’attaquer à une vraie comédie. Il aborde un sujet qui va déranger les bien-pensants : le droit au plaisir et au choix du partenaire pour la femme ! Aussitôt, c’est le succès, le public afflue au théâtre du Palais-Royal et cela au grand dam des Grands Comédiens de l’Hôtel de Bourgogne. Les dévots et les pédants s’en mêlent  et s’indignent contre « l’obscénité » et « l’irréligion » de la pièce. C’est la première cabale essuyée par le dramaturge, connue sous l’expression La Querelle de L’Ecole des femmes ! Mais, le sieur Poquelin a de la ressource et de la malice : il rétorque en 1663 à ses adversaires par une courte pièce en un acte, La Critique de L’Ecole des femmes, où il met en scène ses opposants et reprend leurs critiques. Dans la scène 5, on voit débattre un partisan de la pièce, le chevalier Dorante, avec un contradicteur, un marquis. La scène se passe chez une mondaine, Uranie. Ce qui fait tout le sel de cette scène, c’est qu’au lieu de répondre à ses ennemis par un discours de défense, Molière a l’habileté de les mettre en scène puisqu’ils ont été aussi ses spectateurs. On verra comment il transforme un débat en comédie et comment il présente la défense de sa pièce à travers les propos de Dorante, en faisant l’éloge du parterre qui lui a fait un triomphe.

 

I) La comédie de la comédie

 

A) Une joute  verbale mondaine, vide de sens et de fond

 

- La scène est dans un salon mondain et aristocratique dont la maîtresse de maison est Uranie, un prénom de précieuse ! Dorante entre in media res d’un débat sur la pièce de Molière. Il signale que ce sujet est à la mode : « Vous êtes là sur une matière qui, depuis quatre jours, fait presque l’entretien de toutes les maisons de Paris » Molière fait dire de sa pièce qu’elle crée l’événement à Paris et que, par conséquent, le sujet est d’importance. Dorante annonce la tonalité du débat qui va suivre : « On n’a rien vu de plus plaisant que la diversité des jugements qui se font là-dessus ». L’adjectif « plaisant » sera bien ce qui va caractériser le dialogue de cette scène et en faire une aimable comédie malgré l’opposition des points de vue. Molière entend disputer en honnête homme avec pour le représenter Dorante, lui-même honnête homme !

 

- La querelle s’amorce sur un mot du marquis pour juger la pièce, c’est l’adjectif « détestable ». Le vide de son discours est renforcé par la répétition sous forme de variations précieuses : « Je la trouve détestable ; morbleu ! détestable du dernier détestable ; ce qu’on appelle détestable. » La répétition, associée ensuite à une exclamation (« Parbleu ! ») ou à une question destinée à gagner du temps (« Pourquoi elle est détestable ? »), dans un vain effort pour trouver une explication, appartient au comique de mot. Enfin l’explication arrive et c’est une tautologie : « Elle est détestable, parce qu’elle est détestable. » Le marquis se contente d’une appréciation affective négative et Dorante ne se prive pas de le souligner en reprenant par jeu le mot « détestable » et en le retournant contre celui qui l’emploie de manière mécanique : « Et moi, mon cher marquis, je trouve le jugement détestable. » Jusque là, la discussion n’a pas avancé d’un pouce et montre plutôt l’incapacité d’analyse du marquis.

 

- Ce qui est amusant, c’est le malin plaisir que prend Dorante à pousser le marquis dans ses retranchements par un questionnement pressant destiné à l’embarrasser et à faire éclater son ignorance, sa sottise et ses préjugés. La question « mais, Marquis, par quelle raison, de grâce, cette comédie est-elle ce que tu dis ? » suivie d’une injonction « Mais encore instruis-nous, et nous dis les défauts qui y sont » amène le marquis à avouer qu’il n’a pas d’opinion personnelle, qu’il n’a pas écouté (compris ?) la pièce et qu’il s’aligne sur l’avis d’un certain Dorilas. Pire, il finit par avouer qu’il déteste la pièce parce qu’elle réjouit le parterre, c’est-à-dire le peuple. C’est donc bien un préjugé de classe qui guide sa critique et non son intelligence ou son goût.

 

Un petit marquis avec rhingrave, canons, baudrier, souliers à talons rouges

 

B) La caricature dans la caricature

 

- Dorante se lance alors, dans sa réponse, dans un portrait ironique et caricatural  d’un de ces « Messieurs du bel air » qui serait fâché d’avoir ri avec le parterre « fût-ce de la meilleure chose du monde ». Ce portrait à charge  est tiré de la réalité. (Voir note ci-dessous, avant II)

 

- Ainsi ce personnage raillé par Molière portait même un nom ridicule dans la réalité : Plapisson ! Mais revenons à la composition de ce portrait. Toutes les formes de comiques sont ici convoquées. D’abord, le comique de geste ou de comportement en opposition volontaire avec les réactions communes : « Il écouta toute la pièce avec un sérieux le plus sombre du monde ; et tout ce qui égayait les autres ridait son front. A tous les éclats de rire, il haussait les épaules, et regardait le parterre en pitié ». Ensuite, le comique de situation car ce beau monsieur, spectateur privilégié assis sur scène, se donne lui-même en représentation et déchaîne les rires du public populaire. Puis, prend place le comique de mot quand le personnage s’adresse au parterre : « Ris donc, parterre, ris donc ! » ce qui ne peut que renforcer l’hilarité du dit parterre à cause de la métonymie et de la répétition amusante. Enfin arrive le comique de mœurs car cet aristocrate « regardait le parterre en pitié » autrement dit avec mépris, ce qui est bien significatif de la morgue des privilégiés de l’ancien régime.

 

- Un deuxième portrait, collectif, celui-là, prend place dans la deuxième tirade de Dorante. Il s’en prend cette fois aux « marquis de Mascarille » ce qui constitue un autocitation de la part de Molière. Le ton est plus polémique, ce que marque le verbe « j’enrage ». Il s’agit de montrer la fatuité de ces petits marquis qui croient faire l’opinion et qui sont incompétents et font tout à contresens : « qui dans une comédie se récrieront aux méchants endroits, et ne branleront pas à ceux qui sont bons ». La généralisation de leur domaines de nuisance est un moyen de chercher pour Molière la solidarité de tous les artistes victimes de tels pédants : « Qui voyant un tableau, ou écoutant un concert de musique, blâment de même et louent tout à contre-sens, prennent par où ils peuvent les termes de l’art qu’ils attrapent, et ne manquent jamais de les estropier, et de les mettre hors de place ».

 

La comédie de la comédie débute sur des futilités, une creuse querelle de mot et tourne vite au portrait à charge visant à ridiculiser les sots, opposants pour s’opposer, et à attaquer leur inculture et leur prétention à vouloir s’instituer connaisseurs dans des domaines où ils sont en réalité totalement ignorants. En opposition à ce public de cuistres, Dorante va faire l’éloge du parterre, c’est-à-dire du bon sens et du bon goût.

 

Note complémentaire : « Tout d’abord la première de L’Ecole des femmes débuta par un scandale. Un certain Plapisson, vieil habitué des salons parisiens, fut atteint jusqu’au fond de son être par le contenu de la pièce. Assis sur la scène, il tournait à chaque pointe ou jeu de scène son visage empourpré par la rage vers le parterre et criait : - Ris donc, parterre! Ris!    Et il montrait en même temps le poing aux spectateurs. Naturellement, son intervention porta à des sommets les rires du parterre. La pièce plut beaucoup au public, et, à la deuxième représentation ainsi qu’aux suivantes, l’affluence fut telle que les recettes atteignirent le chiffre record de mille cinq cents livres par soirée. » (Le Roman de Monsieur Molière, de Mikhaïl Boulgakov - éd. Gérard Lebovici)

 

 

Molière par Charles-Antoine Coypel (1694-1752)

 

II) La charge sociale contre les aristocrates bornés et l’éloge du sens commun du parterre

 

A) L’attaque contre les préjugés des aristocrates bornés

 

- La charge commence par une remarque spirituelle qui joue sur le verbe « garantir » du marquis : « je la garantis détestable » sur lequel rebondit Dorante en disant : « La caution n’est pas bourgeoise » ce qui signifie qu’elle n’est pas fiable puisqu’elle provient d’un aristocrate qui, à cette époque, était souvent désargenté (voir Don Juan et la scène avec son créancier, Monsieur Dimanche). Par conséquent ce que déclare le marquis n’est pas digne de confiance. Cela est à rapprocher d’une autre expression qui porte aussi sur les moyens financiers : « que la différence du demi-louis d’or et de la pièce de quinze sols ne fait rien du tout au bon goût ; que debout ou assis, on peut donner un mauvais jugement », mais, cette fois, pour soutenir le peuple qui n’a pas les moyens de se payer une place assise, sans pour autant manquer de finesse et de jugement.

 

- Le préjugé du marquis contre le parterre déclenche en quelque sorte l’offensive de Dorante contre « ces Messieurs du bel air » qui comme le marquis ne prennent « même pas la peine d’écouter » et de savoir de quoi ils parlent. La réaction goguenarde du marquis « Te voilà donc, Chevalier, le défenseur du parterre ? Parbleu ! je m’en réjouis, et je ne manquerai pas de l’avertir que tu es de ses amis, Hai ! Hai ! » montre d’ailleurs que sa prévention contre une classe qu’il considère comme inférieure est irréductible.

 

B) L’éloge du bon sens du parterre et la définition du bon public

 

- Le ton de Dorante devient alors didactique et sentencieux. L’utilisation des impératifs le montre : « Apprends, Marquis, je te prie, et les autres aussi, que le bon sens n’a point de place déterminée à la comédie » ou encore : « Ris tant que tu voudras. Je suis pour le bon sens ». L’éloge du bon sens ou du sens commun va être associé au bon goût et progressivement au parterre, c’est-à-dire au public populaire. L’ajout dans l’apostrophe au marquis de « et les autres aussi » élargit la tribune et vise tous les adversaires de Molière et, en même temps, capte la sympathie du parterre qui fait son succès.

 

- Ce parterre, Dorante, lui accorde sa confiance : « je me fierais assez à l’approbation du parterre ». Le « assez » est une litote pour dire « beaucoup », bien sûr !  Suit alors la définition d’un bon public : « Il y en a plusieurs qui sont capables de juger d’une pièce selon les règles, et que les autres en jugent par la bonne façon d’en juger, qui est de se laisser prendre aux choses, et de n’avoir ni prévention aveugle, ni complaisance affectée, ni délicatesse ridicule ». Savoir juger les pièces selon les règles est un moindre mal, mais plus loin dans la pièce, ce même Dorante dira : « Je voudrais bien savoir si la grande règle de toutes les règles n’est pas de plaire ». Cependant, ce qui fait un bon public, Dorante le définit par la réceptivité : « se laisser prendre aux choses ». La série de négations qui suit consiste à dénoncer ce qui fait, au contraire, un mauvais public.

 

On le voit, Molière, par la bouche de Dorante, fait feu de tous bois : il fait la leçon aux cuistres prétentieux et incultes, se gagne le soutien du public populaire et espère gagner les aristocrates afin « qu’ils [ne]  se traduisent [plus] en ridicules, malgré leur qualité ».

 

Molière a donc mis en scène sa défense en créant une comédie sur sa comédie. L’originalité de sa pièce est de représenter des spectateurs qui commentent et critiquent une autre comédie. Cette participation active devance les "happening" des temps modernes où le spectateur est partie prenante du spectacle représenté. Cependant, dans cette scène aucun problème de fond  de la pièce L’Ecole des femmes n’est abordé. L’intérêt est ailleurs pour le moment. Avant d’en venir au contenu de la pièce, il s’efforce ici de disqualifier ses détracteurs en les ridiculisant, d’où la joute verbale insignifiante et les caricatures des petits marquis de salon. Celui qui mène la charge est un chevalier, figure de l’honnête homme éclairé qui sait reconnaître le bon jugement du parterre. Molière se fait pédagogue pour expliquer que le théâtre est une école du goût et de l’audace qui peut convenir à tous les publics et qu’être bon public n’est finalement pas donné à tout le monde ! Le théâtre pour réunir les classes sociales, Molière y avait pensé avant bien d’autres …

 

Le Palais-Royal au XVIIe siècle

 où était installée la troupe de Molière, gravure de Thorigny