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mercredi 16 janvier 2013

David , Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard : commentaire de tableau


Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard de Jacques-Louis David (1802) château de Malmaison


Commentaire du tableau de David

Bonaparte au mont Saint-Bernard (1802)

Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir de Stendhal (1830) est un fervent admirateur de Napoléon Bonaparte, comme toute la génération romantique. Autre admirateur, le roi d'Espagne Charles IV, commanditaire du tableau Bonaparte au mont Saint-Bernard peint par Jacques-Louis David en 1802. Ce tableau équestre représente le franchissement des Alpes du général Bonaparte, alors premier consul, et de son armée pendant les guerres d'Italie contre l'Autriche. On verra en quoi ce grand tableau (2,5x2,2 m) est une œuvre de propagande à la gloire de celui qui est devenu l'empereur des Français. Après avoir examiné le cadre hostile et dangereux dans lequel progressent Bonaparte et son armée, nous nous attacherons à montrer la mise en valeur d'un chef glorieux, symbole de libération et de gloire.


  1. Un cadre hostile et dangereux


A) Un cadre hostile : les Alpes enneigées


Dans ce grand tableau, ciel et terre s'affrontent en deux triangles coupés par une diagonale qui va de gauche à droite. Le ciel est plombé et gris et les montagnes sont sombres, rocheuses, sans végétation et recouvertes d'un tapis neigeux. C'est donc un environnement hostile et sans vie.


Le paysage neigeux qui comporte un risque de dérapage s'ajoute au danger. Le vent qui pousse à l'avant, comme en atteste l'étole de Bonaparte qui se déploie et la crinière et la queue du cheval qui sont soulevées, rend plus difficile l'ascension des soldats et de leur chef.



B) Ascension périlleuse


Le cheval est sur la diagonale du tableau, en parallèle des crêtes des montagnes (diagonale ascendante). Le cheval cabré, au bord du gouffre, rend la montée périlleuse et risque la chute. Son œil est effrayé, malgré sa force musculaire.


Le cheval est fougueux alors que le cavalier est calme. Les rênes sont lâches, Bonaparte n'appuie que la pointe de son pied sur l'étrier. Mais son corps, en diagonale opposée à la diagonale ascendante, contrebalance les forces et rétablit l'équilibre menacé par sa posture peu réaliste .


On note aussi la progression difficile au deuxième plan des soldats, penchés en avant, avec le matériel lourd d'artillerie.


Ce tableau représente une ascension audacieuse d'une armée dans un décor et un climat hostile et froid : difficulté pour avancer pour les soldats et pour leur chef, au bord du déséquilibre, mais dans une posture de gloire.


  1. Un chef glorieux symbole de la République : une vision épique


A) Des soldats guidés et protégés


Une colonne de soldats au second plan est sous la protection du cheval et de Bonaparte.


Les uniformes bleus et le matériel d'artillerie connotent une scène de guerre, c'est donc un tableau héroïque et épique : la légende de l'épopée napoléonienne est en marche !


Cependant, il y a volonté d'humaniser la colonne militaire, montrée à mi-corps et dans un uniforme similaire à celui de son chef.


B) Bonaparte : un symbole d’héroïsme et de libération


Il s'inscrit dans la lignée des conquérants car les noms de Bonaparte, d'Hannibal et de Charlemagne sont gravés sur une pierre au premier plan, en bas, à gauche.


Bonaparte est l'allégorie du guide et du héros que la légère contre-plongée grandit et magnifie. Les couleurs chaudes sont concentrées sur lui, ainsi que la lumière qui l'illumine, tout comme la robe blanche symbolique de son cheval. La main droite nue du cavalier est pointée vers le ciel, c'est la direction vers la montagne et vers « la route de la victoire ». Le visage juvénile, signe de vie et d'espérance, est tourné vers les spectateurs, comme pour les prendre à témoin et leur montrer son assurance et sa détermination.


Enfin, la cocarde tricolore sur son bicorne, son uniforme de parade de général en chef des armées et le drapeau qui flotte à droite, en bas du tableau, en font l'incarnation de la République qui sera sauvée grâce à sa bravoure et à ses qualités de stratège et de chef.


Il s'agit donc bien d'un tableau de propagande qui sera ensuite reproduit en quatre autres versions très proches, à la demande de Bonaparte. Dans cette œuvre picturale néoclassique, Bonaparte bravant les éléments, domptant un cheval fougueux, protégeant et guidant son armée en digne héritier des héros de l'Antiquité et du Moyen-Age, c'est le nouvel Hannibal, le nouveau Charlemagne, c'est un héros épique. L'empereur qu'il est devenu doit sa légitimité et sa gloire à sa bravoure, à son titre de sauveur de la patrie. Dans l'iconographie et l'imaginaire collectif français, Napoléon occupe le terrain jusqu'en 1940, où De Gaulle va prendre la relève.




Pour voir la méthode du commentaire de tableau, cliquer ICI


Voici comment Bonaparte a réellement franchi les Alpes

ou comment on démonte un mythe !



Bonaparte franchissant les Alpes de Paul Delaroche (1850) Walker Art Gallery Liverpool



Cours de Céline Roumégoux

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