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samedi 13 septembre 2014

Dans le jardin de la bête (2012) de Erik Larson



Juin 1933 à Berlin, au Consulat américain un homme est recueilli dans un état de santé alarmant, écorché vif sur une majeure partie de son corps. Du cou aux talons, il n'est plus qu'une masse de chair sanguinolente à vif. Messersmith, un agent consulaire va lui délivrer un nouveau passeport américain et il pourra s'enfuir aux Etats-Unis avec sa femme. Ces marques de violence étaient l'œuvre des SA (sections d'assaut)  qui commençaient à semer la terreur dans les villes et à Berlin notamment.



            En juin 1933, Théodore Roosevelt, Président des Etats-Unis, demande à William Dodd, directeur du département d'histoire à l'université de Chicago, s'il accepte d'être le nouvel Ambassadeur américain à Berlin. William Dodd n'est pas un diplomate mais un historien, germanophone et germanophile. Il a fait une partie de ses études à Leipzig. Il accepte le poste et part accompagné de sa femme  et leurs deux enfants :  sa fille a 24 ans et William-Junior surnommé Bill a 28 ans. W. Dodd est un homme modeste et entend le rester. Il écrit une œuvre de longue haleine qui l'occupera jusqu'à la fin de sa vie : « Le vieux Sud. »

            Lorsque William Dodd arrive à Berlin, Adolphe Hitler est chancelier. Le pays vit sous une vague de violence des SA qui se déchaînent sur les communistes, les Américains, les juifs, les socialistes en les rouant de coups, les tuant, en toute impunité.  W. Dodd ne peut croire à une telle réalité et pourtant il lui faut bien l'admettre car il la vit au quotidien et la constate de visu. Les dires de son prédécesseur n'étaient  que triste réalité. Il assiste impuissant aux événements qui se passent dans sa ville, proteste avec véhémence autant qu'il le peut pour protéger les citoyens américain juifs des mesures de rétorsion : privation du droit d'exercer leur travail, atteinte à leurs droits civiques. Certains sont victimes d'agressions physiques. W. Dodd ne composera jamais avec le régime nazi, refusera toujours d'apparaître dans les grandes réceptions du Parti national-socialiste. Mais il assistera impuissant à la montée de la violence destructrice de ce parti et de la fureur d'Hitler quand les SA voudront se dresser face à lui pour son accession au pouvoir, le 30 juin 1934. C'est « la Nuit de Cristal », Hitler fait arrêter Röhm à l'hôtel Hanselbauer.

            A plusieurs reprises W.Dodd tente d'alerter les E. Unis sur la nature du régime de Hitler et l'orientation de son pouvoir mais on ne le prend pas au sérieux. Pour aggraver les choses, sa fille Martha s'affiche avec R. Diels, le chef de la Gestapo. Elle collectionne les amants parmi le corps diplomatique. Elle s'éprend d'un espion russe Boris Vinogradov et s'affiche ouvertement avec lui les derniers mois où elle reste à Berlin. Elle ira même jusqu'à faire un voyage de plusieurs semaines en Russie alors que Boris est retenu à Moscou par ses employeurs. W. Dodd est rappelé fin décembre 1937, il quitta son poste la mort dans l'âme, navré de n'avoir pas réussi à alerter suffisamment les autorités américaines sur ce qui se tramait en Allemagne. Le destin de l'histoire était en marche et un homme de bonne foi ne pouvait seul s'opposer à la folie meurtrière de celui qui se présentait comme le sauveur de la nation allemande.




            Ce livre n'est pas un roman mais se lit comme un véritable thriller tant l'angoisse est palpable au fur et à mesure de la montée de la violence des dirigeants. On a peine à croire que la population allemande se soit laissé aller à cette violence sans rien dire, sans protester. Nombreux furent-ils à avoir fait les frais de la montée du nazisme, les communistes, les socialistes, les juifs, les intellectuels humanistes, les populations minoritaires indésirables. Mais dans ce monde feutré des ambassades, rares étaient les diplomates qui osaient dire ouvertement ce qu'ils pensaient de la situation. Leur immunité consulaire leur permettait cependant certains privilèges. A son retour aux Etats-Unis, en janvier 1938, William Dodd déclara : « L'humanité se trouve en grand danger mais on dirait que les gouvernements démocrates ne savent pas comment agir. S'ils ne font rien, la civilisation occidentale, les libertés religieuses, privées et économiques seront en grand danger. » (P. 512)
L'histoire allait malheureusement lui donner raison quelques années plus tard.

(écrit le 7/02/2014)           Josseline G.G.

mercredi 3 septembre 2014

Le secret du treizième apôtre de Michel Benoît (2006)





              Dans le train express Rome-Paris, un moine, le père Andréï est assassiné, défenestré mais sa hiérarchie et les hautes autorités ecclésiastiques vont s'employer à faire classer l'affaire en suicide. Qui était le père Andréï, quelles affaires traitait-il avec le Saint-Siège qui avait exigé sa présence au Vatican ? Ce chercheur était sur le point de découvrir un secret s'orientant autour de la nature du Christ. Jésus était-il simplement un homme comme les autres ou était-il ce ressuscité qui allait donner à la religion chrétienne cette aura de mystère dont ont besoin les croyants ? Tout repose sur le témoignage d'un aimé de Jésus, le 13ème apôtre qui aurait consigné le récit de sa mort et son enterrement dans un désert par les Esséniens.Jésus ne serait ressuscité d'entre les morts et toute la théorie de la religion s'effondrerait entraînant ainsi le chaos dans la foi et l'écroulement du pouvoir spirituel. Il est donc indispensable d'empêcher que de pareilles assertions se propagent.

            Andréï éliminé, le père Nil qui appartient à la même abbaye des Pays de Loire, l'Abbaye Saint-Martin, reprend l'enquête de son ami.Tous deux avaient échangé sur le sujet et les conséquences d'une telle révélation pour l'unité de l'église catholique. C'est à lui qu'incombe d'identifier le corps du père Andréï et il découvre dans la paume d'une main de son ami, un petit papier plié avec quelques indications qui semblaient lui être destinées. A partir de ces éléments, il va poursuivre son enquête personnelle.

            Très vite il est suspecté par le supérieur de son couvent : à deux reprises sa cellule est fouillée, le mot explicatif est dérobé, les notes de recherches de Nil sont éparpillées, déclassées, volées. Puis il est convoqué à Rome au Vatican pour travailler en collaboration avec un musicien, le Cardinal Leeland, officiellement pour l'aider dans ses recherches musicales, concernant des chants grégoriens. Autour de ces deux hommes va s'organiser une véritable traque faite d'écoutes, de filatures. Il s'agit de savoir où en sont les découvertes de Nil, ce qu'il a l'intention d'en faire. Ses révélations vont aussi bien à l'encontre du monde chrétien que du monde musulman, pour des raisons peu éloignées l'une de l'autre. Les voilà devenus des cibles à abattre.

            Parallèlement à cette intrigue qui se déroule au 20ème siècle, nous retournons en Judée à l'époque de la crucifixion puis dans les années qui suivirent et nous assistons à la lutte entre les apôtres pour prendre le pouvoir de l'Eglise et former des groupes de fidèles. Lente plongée historique dans le combat pour la prise de pouvoir spirituel en se réclamant du Nazaréen ou Nazôréen.



            Certes, il s'agit d'un roman policier, d'une fiction mais construite autour d'éléments de recherches ayant existé. Quant à la vérité historique, celle qui évoque les coulisses du Vatican, je citerai simplement l'auteur : (P.410) « Quant à ce qui est dit des coulisses du Vatican, ma fréquentation de la Cité sainte me permet de dire que je suis en-dessous de la réalité. »
(p.368) « Toute chose ne peut être connue que de l'intérieur. La science n'est que l'écorce, il faut la franchir pour trouver le cœur, l'aubier de la connaissance. C'est vrai des minéraux, des plantes, des êtres vivants et c'est vrai aussi des Evangiles. Les anciens appelaient cette connaissance intérieure une gnose... La réelle présence de Jésus est si forte qu'elle te relie à tous mais te sépare aussi de tous. » (édition Albin Michel)

            Roman captivant parce qu'il nous entraîne à la recherche de certains manuscrits de la Mer Morte, nous renvoie à des connaissances plus ou moins assimilées, nous remet en question. Roman qui nous ébranle quand nous pénétrons dans les arcanes du pouvoir de Rome, du Vatican, dans ce qui se trame pour conserver intacte  l'image de Jésus-Christ ressuscité. Leeland et Nil échapperont-ils à leurs poursuivants alors qu'ils sont eux-mêmes hébergés par le Vatican, surveillés, espionnés jour et nuit ou presque ? Ce secret menace-t-il à ce point la chrétienté et son pouvoir temporel pour qu'il justifie une telle effusion de sang ?
 Quels sont donc les véritables enjeux ?

                        (écrit le 15/03/2013)  Josseline G.G.

La nonne et le brigand de Frédérique Deghelt (2011)


          Une écriture qui conquiert d'emblée, fine, ciselée, ouvragée, sensuelle, d'une grande délicatesse pour évoquer l'éveil des sentiments amoureux, l'émoi d'un corps qui se donne autant qu'il étreint. Magie des mots, du verbe, de l'évocation des images qu'elle fait surgir dans la musicalité des phrases. Un vrai bonheur, une véritable ivresse à partager. L'histoire est belle, surprenante.

            Cette jeune femme Lysange, petite quarantaine, mariée, mère de deux grands enfants ayant pris leur envol, vit sa vie de façon très libre.. Un mari de quinze ans son aîné, plus un ami qu'un amant. Coincée à Londres dans un aéroport, Lysange doit passer une nuit à l'hôtel, le vol ayant été annulé pour des raisons techniques. Un homme subissant le même contretemps croise sa trajectoire. Le hasard leur distribue des chambres contiguës. Toute la nuit Lysange est hantée par le désir de cet homme qu'elle ne connaît pas. Au petit-déjeuner, à l'hôtel, il s'impose à elle, s'empare de son sac de voyage pour le transporter dans le car pour l'aéroport, la précède et lui annonce qu'ils sont en voyage de noces. Et là, surprise, elle est invitée dans le poste de pilotage à assister au décollage avec son « mari ». Lysange Kenny est déjà conquise par cet homme. Qui est-il, ce prédateur aux yeux de loup ? Un reporter-photographe de guerre qui part couvrir les territoires où éclatent les conflits armés.

            Parallèlement à cette rencontre, l'auteur nous entraîne dans une histoire qui semble n'avoir aucun lien avec la précédente. Lysange a reçu une lettre d'un certain Tomas Uhlrich, possesseur d'une cabane en bois dans le sud-ouest, dans les dunes surplombant la mer. Cet homme désirait regagner le Brésil où il avait passé une grande partie de sa vie et pourrait confier sa maison à Lysange. Pourquoi elle ? Son père et sa mère s'étaient rencontrés au Brésil. Anne, sa mère avait perdu son mari, de quinze ans son aîné puis elle avait perdu Vincent, le frère aîné de Lysange dans un accident de voiture. Un an après la mort de Vincent, sa mère Anne, mourait d'un arrêt cardiaque. Lysange était seule au monde. Elle prend contact avec Tomas, le rencontre en gare de Bordeaux et il la conduit dans sa petite maison de bois dans les dunes. Chaleureux, accueillant mais réservé, il laisse traîner un carnet rouge en évidence sur une étagère « Journal de sœur Madeleine ». Ce sera la lecture de lysange qui va entrer dans l'intimité d'une jeune nonne de 17 ans , envoyée en Amazonie pour rejoindre une mission et convoyer des caisses de médicaments. Journal intime où l'on suit pas à pas  la lutte de la jeune fille pour ne pas céder à la tentation d'être séduite par son guide-protecteur, un certain Angel.


            Que fait ce cahier ici ? Pourquoi Tomas le laisse-t-il à la potée de Lysange ? Quel rapport existe-t-il entre cet homme Tomas et le Brésil ? Pourquoi a-t-il choisi Lysange pour lui confier sa maison ?  Autant de questions qui trouveront des réponses dans le dénouement de ce roman à l'intrigue savamment nouée, jamais ennuyeuse. Un véritable régal que cette prose.

            (p.29)"Là où le cœur psalmodie une prière, je te supplie des yeux d'attendre encore un peu. Ces vagues ne finissent jamais de passer par-dessus le bastingage. (…) Je suis en terre de volupté, je ne rêve plus, je suis au-delà. Je n'ouvre pas les yeux. Je te quitte avant le chemin des fulgurances. " Actes Sud.

Josseline G.

mardi 2 septembre 2014

Des fleurs pour Algernon (1966) de Daniel Keyes



           


        Charlie Gordon est un adolescent attardé mental qui a trouvé un petit travail dans une boulangerie, affecté aux tâches les plus ingrates. Mais il a une vie sociale même s'il est l'objet des moqueries et plaisanteries de certains. Dans un centre d'expérimentation médicale, deux docteurs, le professeur Nemur et le docteur Strauss viennent d'expérimenter sur une souris blanche Algernon. Après opération sur son cerveau, elle est capable de réaliser des parcours dans un labyrinthe sans se tromper, en un temps record. Forts de ce succès, ils décident de tenter l'expérience de l'opération sur un cerveau humain, celui d'un simple d'esprit, Charlie Gordon. Sa famille accepte, l'ayant déjà relégué à l'asile Warren pour qu'il ne nuise pas au bon développement de sa sœur Norma.

            L'opération est un succès et Charlie s'éveille à l'intelligence en un temps qui défie les lois communes. Il rattrape son retard en lecture, orthographe, devient doué, surdoué, passe brillamment les tests, les examens. Il écrit des articles dans de nombreux domaines : mathématique, physique … Toutes les disciplines lui sont accessibles, il parle couramment sept langues. Mais un jour les facultés d'Algernon, la petite souris, sa compagne, déclinent. Charlie dans son intelligence a pressenti les premiers symptômes des défaillances de l'implantation sur la souris et il a fait le rapprochement avec sa propre vie, sa propre intelligence. Il sait que ses jours sont comptés, que son potentiel intellectuel va décroître aussi vite qu'il a grimpé. Va-t-il conserver le bénéfice de l'apprentissage de la lecture, de ses découvertes ?

            Que va devenir son amour naissant partagé pour Alice Kinnian, sa psychologue ? Il a découvert le monde des relations humaines, l'orgueil, la cupidité de certains, l'empathie et l'amour des autres, la pitié et le rejet. Mais il sait qu'il va régresser à l'image de sa petite souris-cobaye. Alors une course contre la montre s'engage pour vivre intensément, accomplir ses engagements avant que ses facultés ne s'éteignent à tout jamais. Y parviendra-t-il ? Charlie analyse lui-même le processus de dégradation progressive qui va se produire sur son psychisme et ses facultés intellectuelles qui vont être soufflées comme une bougie. Sa lucidité nous laisse désarmés à partager sa détresse, celle de voir s'enfuir l'accès à la connaissance, à l'intelligence, l'ouverture au monde. Le voilà condamné à rejoindre le monde des non-êtres.
(p.433) «  Le stimulus chirurgical auquel nous avons été tous deux soumis a entraîné une intensification et une accélération de tous les processus mentaux. Son évolution inattendue que j'ai pris la liberté de nommer l'effet Algernon-Gordon, est l'extension logique de toute l'accélération de l'intelligence (…)  L'intelligence artificiellement augmentée se dégrade selon un taux directement proportionnel à la valeur de l'augmentation. »


            Livre poignant que cette fiction qui permet à un simple d'esprit d'accéder à la connaissance, à un degré très avancé de culture et de savoir en diverses disciplines. Pourtant ce savoir, cette science ne seront qu'éphémères car obtenus par opération chirurgicale et manipulation scientifique. Il n'en faudra pas plus pour éveiller à la conscience du trésor qu'est l'intelligence  et le savoir pour un être humain. Et ce sera précisément la perte de ces facultés miraculeusement acquises qui rendra plus poignante la régression de Charlie jusqu'au stade initial.

            Pourquoi lui avoir donné l'illusion de la connaissance pour qu'il retombe dans le néant d'où il venait ? Cela les chercheurs ne l'avaient pas anticipé. L'expérience sur la souris Algernon aurait dû susciter plus de prudence et de recul. Livre riche d'enseignement sur ces êtres qui souffrent dans leur corps et dans leur esprit. Du fond de leur connaissance enténébrée, surgissent des moments de lucidité, de clairvoyance. Et même s'ils n'ont pas les mots pour le dire, les maux dont ils souffrent sont bien réels, coupés des autres, exclus, différents, rejetés mais si semblables à nous, dans notre solitude d'être humain abandonné à notre sort. Peut-être ce livre vous permettra-t-il de considérer les handicapés mentaux comme Charlie avec un peu plus d'humanité. Alors tout  ne sera pas perdu.


                                                                                  (écrit le 21/10/2013)  Josseline G.G.

Juste une ombre ( 2012) de Karine Giébel





Cette femme écrivain est l'auteur de Terminus Elicius (2004), Les morsures de l'ombre (2007) et Chiens de sang (2008), tous ces romans appartiennent à la catégorie du roman policier.
            Il est des livres qui une fois refermés ne vous quittent plus, s'inscrivent en vous au fond de votre mémoire, de vos sens en éveil tant ils ont éveillé en vous d'émotion, d'angoisse, de malaise, de mal-être. Celui-ci en fait partie. Mais loin de moi l'idée d'une critique, sinon positive. Ce livre vous prend aux tripes, joue avec vos nerfs, vos émotions, votre peur de femme d'être agressée, violée, laissée en sursis pour mieux retomber entre les mains du prédateur qui a choisi sa victime.

            Mais qui est cette victime ? Une jeune femme brillante, haut placée dans une agence de publicité. Elle brigue le poste de direction qui devrait lui revenir selon les promesses du PDG. Mais alors que sa carrière semble promise au succès, au retour d'une soirée, elle est suivie dans la rue par une silhouette, une ombre, vêtue de noir, une capuche sur la tête. Il s'amuse à lui faire peur et disparaît sans la toucher. Et ce sera le lent engrenage d'une présence insidieuse : une personne qui la croise sur son chemin vêtue de la même façon, une sensation d'être suivie en voiture, une évidence même. La nuit dans son appartement, elle se réveille et l'ombre est à son chevet ou s'éclipse doucement laissant des messages sur la glace du lavabo. Elle retrouve son frigo rempli un soir alors qu'elle l'avait laissé vide le matin même. Elle glisse peu à peu dans une peur panique après avoir vainement essayé de porté plainte au commissariat. On la prend pour une dingue, une paranoïaque : elle ne peut rien prouver. Lorsqu'elle se retrouve nue, violée en pleine forêt, on ne constate pas d'ecchymoses sur son corps ou autres indices probants. Chloé Bauchamps ne dort plus, essaie de lutter comme elle peut mais perd ses repères, ses amis, sa fiabilité, sa pugnacité. Elle se fragilise, se craquèle, rompt avec ses amis. Son petit ami Bertrand rompt brutalement : les sautes d'humeur de la jeune femme et ses peurs irraisonnées l'inquiètent, le déstabilisent. 



            Seul un commandant de police, Alexandre Gomez, à peine sorti du deuil de son épouse, accepte de l'écouter. Mais il n'est pas en mission officielle, actuellement en congé forcé pour une bavure policière qui a conduit un de ses jeunes lieutenants de 25 ans à l'hôpital entre la vie et la mort. Seul Gomez croit à la version de Chloé car elle ressemble à une histoire similaire arrivée quelques années plus tôt à une autre jeune femme Laura Paoli. Il décide d'enquêter pour mettre au jour les points communs entre les deux jeunes femmes et comprendre les motivations du harceleur. Qu'est devenue Laura ? Elle s'est suicidée après avoir passé pour folle auprès de ses employeurs et de ses proches. Même technique, même moyen pour fragiliser une personne.

            Qui donc est cet inconnu qui s'insinue dans la vie de Chloé, la drogue à son insu, la regarde dormir, la prive aussi de sommeil ? Que veut-il ? Simplement la dominer, la faire basculer dans la folie, la tuer ? L'aime-t-il ? Gomez parviendra-t-il à aider Chloé à se soustraire aux griffes de son prédateur ?

            Jamais un livre n'aura ménagé un tel suspense, de tels rebondissements. On vibre à la détresse de cette femme que l'on aimerait voir sauvée mais ... Il faut lire ce roman policier tout en demi-teinte car il mêle plusieurs histoires psychologiques. La recherche du meurtrier est un aspect du livre mais l'approche de la psychologie des personnages dans leur quête de réconciliation avec eux-mêmes ou de reconstruction de soi est un autre aspect passionnant. Au-delà de l'intrigue policière, il y a la lutte de cette jeune femme pour conserver son intégrité physique, pour ne pas céder à la panique de l'angoisse, de menaces qui planent sur sa vie.

            L'écriture est agréable, facile, des phrases relativement courtes qui conviennent à l'accélération de la tension de certains passages du roman. La tension s'instille dans nos veines comme dans celles de notre héroïne. Du grand art en vérité.

                                                           (écrit le 5/06/2013) Josseline G.G.